
Qu’est-ce que la période d’essai ?
La période d’essai est une période transitoire de durée limitée, incluse dans le contrat de travail, qui précède l’engagement définitif. Elle fait partie intégrante du contrat et n’est pas un avant-contrat comme une promesse d’embauche. Son régime juridique a été introduit par la loi n°2008-596 du 25 juin 2008.
Conformément à l’article L.1221-20 du Code du travail, la période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent. C’est une période où les parties sont liées juridiquement, avec des droits et obligations, mais où le droit de la rupture du contrat de travail « ordinaire » ne s’applique pas.
Attention à ne pas confondre la période d’essai avec l’essai professionnel, qui est un test ponctuel pour vérifier l’aptitude d’un candidat, ni avec la période probatoire. La période probatoire intervient lorsqu’un salarié déjà en poste change de fonctions et a pour objet de le tester dans ses nouvelles attributions. Si le salarié échoue pendant la période probatoire, le contrat de travail n’est pas rompu, mais le salarié est replacé dans ses fonctions antérieures. Le régime juridique de la période d’essai ne s’applique pas à la période probatoire.
Comment prévoir une période d’essai ?
La période d’essai n’est pas obligatoire. Si l’employeur souhaite en prévoir une, cette clause doit être obligatoirement être précisée par écrit dans le contrat de travail ou la lettre d’engagement, tant dans son principe que dans sa durée et les conditions de son renouvellement.
À défaut d’accord écrit, la période d’essai ne sera pas opposable au salarié, qui sera réputé avoir été définitivement embauché dès le début du contrat. La période d’essai ne se présume pas.
La durée de la période d’essai
La durée de la période d’essai doit être suffisante pour permettre aux parties de procéder aux évaluations nécessaires, sans être excessivement longue, car elle constitue une période d’incertitude pour le salarié. Pour cette raison, le Code du travail encadre strictement sa durée. La durée maximale est d’ordre public, ce qui signifie qu’une durée supérieure ne peut pas être convenue, même si le salarié est d’accord. Cependant, une durée plus courte peut toujours être prévue car elle est favorable au salarié. La convention collective applicable peut également prévoir des durées maximales différentes, potentiellement plus favorables au salarié.
Pour les contrats à durée indéterminée (CDI), la durée initiale maximale légale est de :
- 2 mois pour les ouvriers et les employés.
- 3 mois pour les agents de maîtrise et les techniciens.
- 4 mois pour les cadres. Les conventions collectives conclues avant la loi du 25 juin 2008 peuvent prévoir des durées initiales plus longues.
Pour les contrats à durée déterminée (CDD), la durée de la période d’essai est d’un jour par semaine de travail prévu, dans la limite de deux semaines pour les contrats d’une durée inférieure ou égale à six mois, et d’un mois si la durée du contrat est supérieure à six mois. Si le CDD n’a pas de terme précis, la période d’essai est calculée par rapport à la durée minimale prévue au contrat.
Pour les contrats de mission (travail temporaire), la durée est de 2 jours si la durée du contrat est inférieure ou égale à 1 mois, 3 jours si elle est entre 1 et 2 mois, et 5 jours si elle est supérieure à 2 mois, sauf dispositions conventionnelles prévoyant une durée inférieure.
La période d’essai débute nécessairement au commencement de l’exécution du contrat de travail. Elle se décompte en jours calendaires, y compris les jours non travaillés. Si le dernier jour tombe un dimanche ou un jour férié, il n’est pas reporté. Le décompte est le même pour un emploi à temps plein ou à temps partiel.
Si un salarié est embauché en CDI ou CDD immédiatement après un stage de fin d’études dans la même entreprise, la durée du stage est prise en compte dans la période d’essai, sans que cela réduise cette dernière de plus de la moitié. Si l’embauche concerne un emploi correspondant aux activités confiées durant le stage, la durée du stage est déduite intégralement.
Un employeur ne peut pas imposer une nouvelle période d’essai si le salarié en a déjà effectué une pour le même poste dans le cadre d’un précédent CDD successif dans la même entreprise. Si l’employeur rompt le contrat durant une telle seconde période d’essai, la rupture est analysée comme un licenciement.
Renouvellement et prolongation de la période d’essai
Pour les CDI, la période d’essai peut être renouvelée une seule fois. Ce renouvellement est soumis à trois conditions cumulatives:
- Un accord de branche étendu doit le prévoir.
- La possibilité de renouvellement doit être expressément prévue dans le contrat de travail ou la lettre d’engagement.
- L’employeur doit obtenir l’accord du salarié en vue du renouvellement de sa période d’essai. Cet accord doit être donné pendant la période initiale, être clair et non équivoque, et il est fortement recommandé qu’il soit donné par écrit pour des raisons de preuve.
La durée totale de la période d’essai, renouvellement compris, ne peut dépasser les maxima légaux suivants pour un CDI:
- 4 mois pour les ouvriers et employés.
- 6 mois pour les agents de maîtrise et techniciens.
- 8 mois pour les cadres. Ces durées maximales sont impératives.
Contrairement aux CDI, la période d’essai d’un CDD ne peut pas être renouvelée.
La prolongation de la période d’essai est différente du renouvellement. Il s’agit d’un simple report du terme lorsque la période d’essai a été suspendue, par exemple en cas d’arrêt maladie ou de fermeture de l’entreprise pour congés. La durée de la période d’essai est alors prolongée automatiquement d’une durée égale à celle de la suspension. L’accord du salarié n’est pas nécessaire pour cette prolongation. Le régime de la période d’essai reste inchangé durant la prolongation.
La rupture de la période d’essai
Durant la période d’essai, l’employeur et le salarié ont la liberté de rompre la relation de travail. Cette rupture n’est ni un licenciement ni une démission, et les règles de rupture du contrat de travail « ordinaire » ne s’appliquent pas. La rupture doit impérativement intervenir avant le terme de la période d’essai (initiale ou renouvelée), faute de quoi elle sera qualifiée de licenciement ou de démission.
En principe, la rupture de la période d’essai n’est soumise à aucune procédure particulière et peut être verbale. Cependant, il est fortement conseillé de notifier la rupture par écrit, de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre signature, afin d’avoir une preuve certaine de la date de rupture.
L’employeur n’a pas, en principe, à justifier le motif de la rupture. Toutefois, s’il invoque un motif disciplinaire, il doit respecter la procédure disciplinaire (convocation à entretien préalable, notification de la sanction), même si la rupture n’est pas un licenciement formel. Le non-respect de cette procédure ouvre droit à dommages et intérêts pour le salarié.
La partie qui décide de rompre la période d’essai doit respecter un délai de prévenance. Ce délai varie en fonction de la durée de présence du salarié dans l’entreprise.
Pour l’employeur, le délai minimum de prévenance est de :
- 24 heures si la durée de présence est inférieure à 8 jours.
- 48 heures si elle est comprise entre 8 jours et 1 mois.
- Deux semaines si elle est supérieure à 1 mois et inférieure à 3 mois.
- Un mois si elle est supérieure à 3 mois. La convention collective peut prévoir des délais de prévenance plus favorables au salarié.
Si l’employeur ne respecte pas le délai de prévenance, il doit verser au salarié une indemnité compensatrice égale au montant des salaires et avantages que celui-ci aurait perçus s’il avait travaillé jusqu’à l’expiration de ce délai. Le délai de prévenance ne peut pas avoir pour effet de prolonger la période d’essai au-delà de son terme initial ou renouvelé.
La rupture de la période d’essai à l’initiative de l’employeur ouvre droit aux allocations chômage pour le salarié s’il remplit les conditions requises.
Limites à la rupture de la période d’essai par l’employeur
Bien que la rupture de la période d’essai soit libre en principe, elle ne doit pas être abusive. Une rupture est considérée comme abusive notamment lorsqu’elle est sans rapport avec le but de l’essai (l’évaluation des compétences), ou lorsque l’employeur agit avec une « légèreté blâmable », par exemple dans des circonstances humiliantes, ou si la rupture intervient si tôt que le salarié n’a pas eu le temps de faire ses preuves. La charge de la preuve de la rupture abusive incombe au salarié. En cas d’abus avéré, le salarié a droit à des dommages et intérêts, mais ne peut exiger le maintien de son contrat.
La rupture ne doit pas non plus être discriminatoire. L’article L.1132-1 du Code du travail qui prohibe les discriminations s’applique à la période d’essai. En cas de rupture discriminatoire, le salarié a droit à des dommages et intérêts d’un montant minimal de six mois de salaire, mais l’employeur n’est pas tenu de poursuivre le contrat.
Enfin, pour les salariés protégés (représentants du personnel, délégués syndicaux, etc.), la rupture de la période d’essai est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail.
La rémunération versée pendant la période d’essai est celle fixée dans le contrat de travail. À la fin de la période d’essai, en l’absence de rupture, le contrat de travail devient définitif.