
La date limite du 15 janvier 2026 approche pour la liquidation et la régularisation de la taxe sur les salaires due au titre des rémunérations de l’année 2025. Cette échéance est l’occasion de revoir les principes d’assujettissement à cette taxe, ses méthodes de calcul et les démarches déclaratives obligatoires pour les employeurs.
Employeurs redevables de la taxe sur les salaires
Critères d’assujettissement
Pour être assujetti, un employeur doit remplir plusieurs conditions : être établi en France, ne pas être assujetti à la TVA (totalement ou partiellement), et ne pas bénéficier d’une exonération spécifique.
Sont concernés notamment les établissements bancaires et financiers, les assureurs, certaines professions libérales (médecins, prothésistes dentaires), les associations de la loi de 1901 et organismes sans but lucratif, les caisses de retraite et de sécurité sociale, les hôpitaux publics, les sociétés d’investissement ou immobilières civiles, ainsi que l’État et certains établissements publics.
Employeurs établis en France
La taxe est due par toute personne physique ou morale domiciliée ou établie en France, c’est-à-dire en métropole ou dans un département d’outre-mer. L’employeur doit avoir un centre d’opérations stable et autonome. Le domicile fiscal du salarié ou le lieu d’exercice de son activité n’influe pas sur l’exigibilité de la taxe. Les rémunérations des salariés détachés à l’étranger ou des frontaliers (belges, suisses, luxembourgeois) sont également concernées, sauf exception.
Pour une succursale française d’une société étrangère rendant exclusivement des services à son siège, l’administration admet une non-redevabilité de la taxe si ces services auraient ouvert droit à déduction de TVA si la société avait été une filiale.
Situation de l’employeur au regard de la TVA
La taxe sur les salaires est due par les employeurs établis en France qui versent des rémunérations imposables, s’ils ne sont pas assujettis à la TVA l’année du versement des rémunérations, ou s’ils n’ont pas été assujettis à la TVA sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires l’année civile précédente.
- Un employeur assujetti à la TVA sur 90 % ou plus de son chiffre d’affaires n’est pas redevable de la taxe sur les salaires.
- Un employeur non assujetti à la TVA est entièrement passible de la taxe sur les salaires.
- Un employeur assujetti à la TVA sur moins de 90 % de son chiffre d’affaires est redevable de la taxe sur les salaires sur une base réduite, déterminée par un rapport d’assujettissement.
Le chiffre d’affaires pris en compte inclut le total des recettes et autres produits, même ceux non soumis à la TVA.
Employeurs exonérés
Certains employeurs bénéficient d’une exonération de la taxe sur les salaires :
- Franchise en base de TVA : Les employeurs dont le chiffre d’affaires hors taxes de l’année précédente ne dépasse pas les seuils de la franchise en base de TVA de droit commun sont exonérés. Pour 2025, cela concerne un chiffre d’affaires 2024 de 85 000 € pour les ventes (93 500 € sous conditions) ou 37 500 € pour les services (41 250 € sous conditions). Il est à noter que le chiffre d’affaires à retenir inclut les activités hors champ d’application de la TVA (comme certains dividendes ou subventions), ce qui peut empêcher de bénéficier de l’exonération même en étant en franchise de TVA.
- Avocats, auteurs et artistes : Ils bénéficient d’une franchise spécifique avec des seuils adaptés pour 2025 : 50 000 € pour les activités réglementées (55 000 € sous conditions) et 35 000 € pour les autres opérations (38 500 € sous conditions).
- Garde d’enfants et services à la personne : Les particuliers employant un seul salarié à domicile ou une seule assistante maternelle agréée sont exonérés. L’exonération s’étend aux personnes âgées ou handicapées nécessitant l’assistance d’un tiers pour les actes de la vie quotidienne, même avec plusieurs salariés (si l’équivalent temps plein est respecté).
- Employeurs agricoles : Les employeurs agricoles relevant du régime agricole sont généralement exonérés, sauf les organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles non assujettis à la TVA, ou les agriculteurs qui commercialisent ou transforment leurs produits avec des moyens industriels ou commerciaux.
- État et collectivités publiques : L’État est exonéré pour les rémunérations versées par le budget général, si cela n’entraîne pas de distorsion de concurrence. Les collectivités locales, leurs groupements (syndicats de communes, communautés de communes, etc.) et certains de leurs services publics à caractère administratif sont également exonérés. Les régies personnalisées gérant des services publics à caractère industriel ou commercial peuvent être soumises à la taxe si elles perçoivent des recettes hors champ TVA.
- Établissements d’enseignement : La plupart des établissements d’enseignement supérieur (universités, grandes écoles) et les centres techniques industriels sont exonérés. L’exonération s’applique à toutes les rémunérations versées aux employés de ces établissements, y compris si l’établissement a d’autres activités.
Assiette de la taxe sur les salaires
Alignement sur la CSG applicable aux revenus d’activité
L’assiette de la taxe sur les salaires correspond à celle de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus d’activité. Elle inclut les salaires, primes, indemnités et avantages en nature ou en espèces liés au travail. Sont également intégrés les avantages accessoires assujettis à la CSG, tels que l’intéressement, la participation, les abondements aux plans d’épargne salariale ou les contributions patronales de prévoyance complémentaire ou de retraite supplémentaire.
Particularités de calcul et exonérations liées à l’alignement sur l’assiette de la CSG
Le calcul de la taxe sur les salaires ne tient pas compte de l’abattement d’assiette de 1,75 % appliqué pour la CSG. Sont exclus de l’assiette les avantages liés aux stock-options et attributions d’actions gratuites, ainsi que les éléments de rémunération expressément exonérés de CSG.
Sont par exemple exonérées de taxe sur les salaires : les indemnités journalières de sécurité sociale, les indemnités d’activité partielle, les salaires des apprentis (totalement ou partiellement selon la date de conclusion du contrat), les gratifications de stagiaires dans la limite de la franchise de cotisations, la fraction exonérée de CSG des indemnités de rupture de contrat de travail et des primes de partage de la valeur (PPV) sous certaines conditions. Certaines tolérances doctrinales en matière sociale s’appliquent aussi à la taxe sur les salaires (réductions tarifaires pour salariés, bons d’achat ou cadeaux sous seuils).
Rémunération des dirigeants
Les rémunérations des dirigeants de sociétés (gérants minoritaires de SARL, présidents du conseil d’administration, directeurs généraux de SA, présidents et dirigeants de SAS) sont incluses dans l’assiette de la taxe sur les salaires, car ils sont affiliés au régime général de la sécurité sociale des salariés.
Les fonctions de direction, de par leur caractère transversal, sont généralement considérées comme affectées à l’ensemble des activités de l’entreprise, y compris le secteur financier. La rémunération de ces dirigeants est donc soumise à la taxe selon le rapport général d’assujettissement de l’entreprise. Une preuve contraire peut être apportée, mais elle est complexe à établir.
Exclusions spécifiques à la taxe sur les salaires
Certaines rémunérations sont expressément exclues de l’assiette de la taxe sur les salaires :
- Les salaires versés aux bénéficiaires de contrats aidés (ateliers et chantiers d’insertion, contrats d’accompagnement dans l’emploi).
- Les rémunérations des enseignants des centres de formation d’apprentis (CFA), mais pas du personnel n’ayant pas d’activité d’enseignement.
- Les rémunérations du personnel des cantines d’entreprise, scolaires, ou d’organismes fournissant des repas sur place à leurs pensionnaires (avec des modalités de calcul spécifiques).
- Les primes d’impatriation versées aux salariés et dirigeants bénéficiant du régime fiscal des impatriés.
- D’autres salaires comme ceux liés aux manifestations de bienfaisance, du conjoint de l’exploitant agricole ou de l’associé de société de personnes, les indemnités servies par les caisses de congés payés, les salaires versés par les armateurs de pêche maritime, etc.
Calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires
Modalités de calcul du rapport d’assujettissement
Pour les employeurs partiellement assujettis à la TVA (moins de 90 % de leur chiffre d’affaires), la taxe sur les salaires est due sur une fraction des rémunérations. Ce rapport d’assujettissement est calculé ainsi :
- Numérateur : Chiffre d’affaires réalisé l’année précédente et non soumis à la TVA (incluant les opérations hors champ d’application de la TVA).
- Dénominateur : Chiffre d’affaires total de l’année précédente (incluant toutes les recettes et produits, y compris ceux soumis à TVA et ceux hors champ).
Ce rapport est appliqué après la ventilation des rémunérations dans les tranches du barème. Il peut être arrondi à l’unité inférieure. Pour les employeurs multi-établissements, le même pourcentage s’applique, sauf en cas de secteurs d’activité distincts pour la TVA.
Rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires compris entre 10 % et 20 %
Une décote s’applique si le rapport d’assujettissement se situe entre 10 % et 20 %. Dans ce cas, un tableau spécifique permet de déterminer le pourcentage réduit de salaires à retenir dans la base taxable.
Chiffre d’affaires de référence
Le rapport d’assujettissement est calculé sur le chiffre d’affaires de l’année précédant celle du versement des rémunérations (ex: CA 2024 pour salaires 2025). Des exceptions existent pour les entreprises nouvellement créées, celles ayant opté pour la TVA en cours d’année, ou celles ayant connu une modification significative de leur activité (fusion, cession).
Sommes à retenir pour le calcul du rapport d’assujettissement
Les dividendes, les subventions non imposables à la TVA (sauf exception), les taxes spéciales finançant l’activité, et les produits des opérations internes à un groupe TVA sont à inclure. Les produits financiers exonérés de TVA ou hors champ (intérêts, placements, dividendes) sont inclus, sauf s’ils ont un caractère accessoire (inférieur à 5 % des recettes totales).
Sommes exclues du rapport d’assujettissement
Ne sont pas incluses les indemnités de dommages, les subventions exceptionnelles ou d’équipement, les livraisons à soi-même de biens immobilisés, les cessions de biens d’investissement, les sommes perçues pour le compte de tiers, etc.
Entreprises ayant constitué des secteurs distincts d’activité
Si une entreprise a des secteurs distincts d’activité pour la TVA, elle doit calculer une quote-part des rémunérations soumises à la taxe par secteur. Les rémunérations des personnels affectés exclusivement à un secteur sont soumises au rapport d’assujettissement de ce secteur. Celles des personnels communs sont soumises au rapport général de l’entreprise.
Une activité hors du champ d’application de la TVA peut être assimilée à un secteur distinct, et les rémunérations du personnel qui lui est exclusivement affecté sont alors intégralement soumises à la taxe.
Notion de secteur d’activité incompatible avec les pouvoirs transversaux des dirigeants
Les dirigeants (gérants, présidents, directeurs généraux) sont considérés comme responsables de tous les secteurs d’activité de la société, y compris le secteur financier, en raison de l’étendue de leurs fonctions. Leurs rémunérations sont soumises à la taxe sur les salaires selon le rapport général d’assujettissement de l’entreprise, et non rattachées à un secteur particulier, même si la société dispose de secteurs distincts. La preuve contraire est possible, mais difficile à établir.
Calcul de la taxe sur les salaires
Application du barème
La taxe sur les salaires est calculée avec des taux progressifs appliqués aux rémunérations brutes individuelles annuelles. Pour 2025 :
- 4,25 % pour une rémunération inférieure ou égale à 9 147 €.
- 8,50 % pour une rémunération comprise entre 9 147 € et 18 259 €.
- 13,60 % pour une rémunération supérieure à 18 259 €.
Ces seuils sont revalorisés chaque année. Des taux spécifiques et sans majoration s’appliquent dans les départements d’outre-mer (Guadeloupe, Martinique, La Réunion, Guyane, Mayotte).
Application du pourcentage d’assujettissement
Le rapport d’assujettissement est appliqué au total de la taxe brute obtenue après ventilation des rémunérations dans les différentes tranches du barème. Il s’applique avant la prise en compte de la franchise, la décote ou l’abattement.
Franchise et décote
Une franchise est accordée si le montant annuel de la taxe n’excède pas 1 200 €. L’employeur est alors dispensé de paiement et de déclarations. Si la taxe est entre 1 200 € et 2 040 €, une décote s’applique, égale aux 3/4 de la différence entre 2 040 € et le montant de la taxe. La décote est généralement appliquée lors de la régularisation annuelle.
Abattement
Certains organismes à but non lucratif (associations loi 1901, syndicats, mutuelles, fondations reconnues d’utilité publique, etc.) bénéficient d’un abattement de 24 041 € sur le montant de la taxe due pour les salaires 2025, après application de la décote. Si la taxe est inférieure à l’abattement, l’organisme est dispensé de versement et de déclaration.
Modalités de paiement de la taxe sur les salaires
Acomptes mensuels ou trimestriels
La taxe est due annuellement mais fait l’objet de versements provisionnels. La périodicité des versements en 2025 dépend du montant de la taxe payée en 2024 :
- Inférieur à 4 000 € : un seul versement annuel avec la déclaration de régularisation 2502.
- Entre 4 000 € et 10 000 € : versements trimestriels dans les 15 premiers jours suivant les 3 premiers trimestres. Le versement du dernier trimestre est inclus dans la régularisation annuelle.
- Supérieur à 10 000 € : versements mensuels dans les 15 premiers jours du mois suivant, pour les 11 premiers mois. Le versement de décembre est inclus dans la régularisation annuelle.
Dispenses de versement provisionnel
Les employeurs sont dispensés de souscrire le formulaire 2501 s’ils estiment que le montant annuel de la taxe n’excédera pas la franchise ou l’abattement, ou s’ils n’ont qu’un versement annuel à effectuer, ou pour les versements du dernier mois/trimestre civil qui sont reportés sur la déclaration annuelle.
Modalités de télépaiement des acomptes provisionnels
Le versement s’effectue par télérèglement, accompagné du relevé de versement provisionnel (formulaire 2501), par télétransmission avant le 15 du mois ou du trimestre suivant. Les entreprises multi-établissements versent un montant unique et global. Il est possible d’imputer une créance fiscale.
Report des données sur la DSN
Les rémunérations soumises à la taxe sur les salaires doivent être déclarées mensuellement pour chaque salarié dans la Déclaration Sociale Nominative (DSN), et annuellement pour chaque établissement.
Période des congés payés
En cas de fermeture pendant la période des congés payés, les entreprises peuvent verser un acompte au moins égal à 80 % du versement précédent, à régulariser lors de l’échéance suivante.
Déclaration annuelle de régularisation
Déclaration de régularisation 2502-SD
La déclaration annuelle 2502-SD permet de régulariser la taxe due au titre de l’année civile, car le montant total peut différer des versements provisionnels (en raison des taux majorés ou d’une modification du rapport d’assujettissement). Si la taxe annuelle n’excède pas la franchise ou l’abattement, l’employeur est dispensé de cette déclaration et de tout versement.
Date de télédéclaration de la taxe : transmission du formulaire 2502-SD
La déclaration 2502-SD doit être télétransmise avec le paiement au plus tard le 15 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle la taxe est due (soit le 15 janvier 2026 pour les rémunérations 2025). Une tolérance administrative reporte souvent cette date au 31 janvier. En cas de cession ou cessation d’activité, le délai est de 60 jours. En cas de décès de l’employeur, c’est 6 mois.
Télépaiement de la taxe sur les salaires
Tous les employeurs assujettis doivent payer la taxe en ligne via « www.impots.gouv.fr ». Cela inclut les entreprises étrangères avec un établissement stable en France et un compte bancaire français. Le télépaiement est réalisé via l’espace professionnel en ligne de l’entreprise.
Sanctions
Défaut ou retard de déclaration
Un retard ou défaut de transmission des formulaires 2501-SD et 2502-SD entraîne l’application d’un intérêt de retard (0,20 % par mois) et d’une majoration de :
- 10 % si la déclaration est déposée sans mise en demeure ou dans les 30 jours après.
- 40 % si elle n’est pas déposée dans les 30 jours suivant une mise en demeure.
- 80 % en cas d’activité occulte.
Une réduction de 50 % de l’intérêt de retard est possible pour le contribuable de bonne foi qui dépose spontanément une déclaration rectificative et paie les droits.
Défaut ou retard de paiement
Le défaut ou retard de paiement entraîne l’intérêt de retard et une majoration de 5 % des sommes dues. Cette majoration ne s’applique pas si la déclaration est souscrite tardivement mais accompagnée du paiement total des droits (seules les sanctions pour retard de déclaration s’appliquent alors).
Non-recours à la télédéclaration ou au télérèglement
Le non-respect de l’obligation de télédéclarer et/ou de télépayer la taxe sur les salaires est sanctionné par une majoration de 0,2 % du montant des sommes concernées, avec un minimum de 60 € pour chaque infraction.
Contrôle, contentieux
Le contrôle de la taxe sur les salaires suit les règles de droit commun. Les recours contentieux sont traités comme en matière d’impôts directs. Le délai de réclamation commence à courir à partir de la date de dépôt de la déclaration annuelle 2502-SD, et non à partir des versements périodiques. L’administration dispose d’un délai de 4 ans pour ses actions de recouvrement.

